par Fabrice Imbault, Directeur Général d’A Plus Finance
Toutes les écoles de management enseignent à leurs étudiants l’art délicat du business plan. L’exercice est utile. Il n’est aucun banquier, aucun investisseur qui n’accorderait les moindres fonds sans un business plan prenant en compte les hypothèses les plus précises.
Pourtant, depuis quelques années maintenant, l’exercice du business plan s’avère de plus en plus incertain, notamment sur les entreprises les plus jeunes.
Si les vicissitudes de la réalité des affaires ne sont pas nouvelles, leur ampleur s’est décuplée dans nos économies modernes qui fonctionnent à la nanoseconde et repose sur des business models en perpétuelle évolution. Les investisseurs doivent ainsi s’habituer à soutenir des entreprises dont les décisions stratégiques et le cap peuvent varier fortement et rapidement, et l’accepter.
Là encore, les professionnels sont face à une désynchronisation entre leur vision d’investisseur long terme et la rapidité d’adaptation dont doivent faire preuve les entreprises qu’ils financent. Si l’idée se conçoit plus facilement dans le cas des start up qui par nature doivent être agiles, force est de constater que les situations sont maintenant similaires pour des entreprises plus mûres en phase de développement ou même les grands groupes. Que vaut un business plan dans une économie où le digital et le numérique peuvent « uberiser » des métiers entiers ?
Transposé dans un pays comme la France, où l’étroitesse des marges de manœuvres des entreprises limite leur flexibilité, le phénomène prend toute son ampleur. En effet, il est plus difficile de donner du crédit à une projection d’activité dans un contexte sans reprise économique notable et où la nécessaire reconstitution des marges prime sur l’investissement productif. Le business plan perd peu à peu de sa substance comme outil de pilotage, il demeure néanmoins rassurant dans la prise de décision et met en perspective la cohérence des ambitions du management de l’entreprise.
Il faut donc continuer à y croire, mais plus aux hommes qu’aux chiffres. L’idée n’est pas nouvelle mais la tyrannie française du chiffre reste pour beaucoup un réflexe « pratique » que ce soit dans les bonnes ou les mauvaises situations. Cependant, le temps se raccourci et même dans les grands groupes les plans quinquennaux ont laissé la place à des « Plan stratégique » ou « Ambitions » à 2 ou 3 ans. Marketing, me direz-vous. Peut-être mais les managers doivent vivre avec leur temps et celui de leur mandat…